Aller au contenu
Vie quotidienneAutisme et société

Soulmate : égalité, fraternité et "autodé"

Rémy Ardurat a appelé son application d’autonomisation des personnes TSA "Soulmate". Mais l'âme sœur de l'histoire, c'est son frère autiste Théo, pour qui il repousse ses limites.

Simon Loubris
Simon Loubris
8 min de lecture
L'application Soulmate, créée par Rémy Ardurat, favorise l'autodétermination des personnes autistes.
Photo de Rami Al-zayat sur Unsplash


Au sommaire :

📱 Application : la relation spéciale entre Rémy Ardurat et son frère TSA Théo a donné naissance à Soulmate (prononcer [sôlmeïte] à l'anglaise), une application qui favorise l'autonomie des personnes autistes.
🧰 Boîte à outils : Picto Chef, des recettes de pâtisserie adaptées.
👁️ Vu ailleurs : autisme des pauvres et richesse de l'autisme.
🌞Belle histoire : Adrien Charle est en route et à vélo "À la rencontre de l'autisme".
🎧 Spectre audible : quelles sont les représentations de l'autisme en entreprise ?
👩‍🎓 Webinaire : Focus sur la prestation de compensation du handicap (PCH)

Cette lettre est aussi un peu la vôtre. Si vous voulez réagir à l'un des sujets ou proposer une idée, vous pouvez laisser un 💬 commentaire 💬 ou ✍️ m'écrire ✍️. Je réponds toujours (parfois avec un peu de délai 😭).


📱 Rémy et Théo, âmes frères de l'application "Soulmate"


"Sensoriellement, ça va être immonde". La foule, la chaleur, le bruit, la lumière : tout son entourage déconseille à Rémy d'emmener son frère autiste Théo à un grand prix de Formule 1. Mais Rémy persiste : "Il adore les bagnoles, j'étais sûr qu'il allait kiffer l'expérience."

Résultat ? "C'était lui le plus en forme des quatre, il a adoré." Aujourd'hui encore, quand Rémy montre les photos de cette journée, Théo "a le sourire jusqu'aux oreilles".

Car depuis l'enfance, Rémy Ardurat, 27 ans, a la même philosophie : toujours traiter son frère, plus jeune d'un an et diagnostiqué en 2002, "d'égal à égal". Une approche qui a nourri la conception de Soulmate, une application qui vise à faciliter le quotidien et l'autonomie des personnes autistes.

Du "sixième sens" fraternel au déclic entrepreneurial

"Je ne sais pas vraiment ce que c'est que de grandir dans une famille 'normale' : j'avais un an tout juste quand mon petit frère est arrivé", raconte Rémy. Pour lui, l'annonce du diagnostic de Théo vers l'âge de trois ans n'est "juste qu'une singularité".

Il y a bien sûr des moments de frustration : "Je partais faire du vélo, mais je me sentais un peu con, tout seul alors que Théo était à la maison, et qu'on aurait pu faire du vélo ensemble, jouer au foot, ou construire des cabanes." Mais cette proximité quotidienne forge chez lui ce qu'il qualifie de "sixième sens" : "D'un clin d'œil, d'un geste, d'un comportement, je sais comment je peux le faire rire, comment on peut avoir une interaction." Il observe aussi son frère jongler avec les applications de son iPad, un support sur lequel "Théo a tout de suite accroché".

En 2022, après la période Covid, Rémy interroge, comme l’époque et les jeunes de sa génération, le sens de son métier de technicien informatique : "Qu'est-ce que j'apporte ? Je débranche et je rebranche les souris de mes collègues." 
Le déclic viendra lors d'une réunion avec les professionnels et les familles de l'établissement où réside son frère : il les interroge sur l'existence d'une application unique qui centralise le suivi et les besoins fonctionnels des personnes prises en charge. Ils lui rétorquent, sans défiance : "Nous on n'en connaît pas, mais si vous voulez vous y coller..." Rémy confie : "Je l'ai pris comme un défi, et ça a planté une graine dans mon esprit".

De l'intuition fraternelle à l'innovation sociale

Ses parents, qui ont été partie prenante de l'association qui a créé et fait construire l'IME où Théo a été pris en charge, lui ont appris à se retrousser les manches : "Ils n'étaient pas têtes de proue du projet, mais ils ont dû se battre constamment. C'était un vrai parcours du combattant, il n'y avait de place nulle part".

Alors Rémy se forme seul au développement d'application et présente le projet d'application "Soulmate" pour rejoindre l'École Entrepreneuriale de Kedge Business School, qui conforte son intuition et sa confiance en l'intégrant.

Son point de départ ? Prévisibilité et repères sont essentiels pour réduire l'anxiété des personnes autistes. Or malgré la bienveillance des personnels des établissements, les résidents se retrouvent parfois ballottés : "On leur dit : monte dans la camionnette du foyer, on va aller à tel endroit. Mais c'est parfois difficile à appréhender en l'absence de repère", observe-t-il. Pourtant, "chaque personne devrait avoir le droit d'être au courant de ce qu'elle va faire et d'être rassurée", insiste-t-il.

Soulmate intégrera donc un emploi du temps visuel. Mais aussi des séquenciers de tâches pour plus d’autonomie, et un cahier de vie qui permet au bénéficiaire de partager ses activités avec ses proches, et peut être nourri par les professionnels. Elle sert aussi de cahier de liaison digital pour l’établissement.

Des fonctionnalités qui suivent toutes le même principe directeur : renforcer la dignité des personnes en valorisant leurs compétences et en favorisant l'autonomie et "remettre le bénéficiaire au cœur de son propre accompagnement" plutôt que de le laisser "spectateur" de sa propre vie. Une philosophie de l’autodétermination que Rémy a expérimentée intuitivement depuis l'enfance dans sa relation avec Théo.


Vie quotidienneAutisme et société

Sur ce sujet

Inscrits Gratuit

🏁 Back to school 🏁

Si vous avez toujours un peu la tête en vacances, voici une édition allégée mais plus que jamais bourrée de ressources adaptées à l'autisme.

C'est encore un peu les vacances, mais la rentrée se profile, et il va falloir redescendre sur terre :-)
Inscrits Gratuit

🖥️ Les écrans : menace ou opportunité ?

L'exposition aux écrans des petits et des ados est une source d'inquiétude légitime. Or les enfants autistes consomment notoirement plus d'écrans.

L'utilisation des écrans par les enfants autistes peut-elle être bénéfique ?
Inscrits Gratuit

A Montréal, l'inclusion à hauteur d'ado

Pensé pour accompagner les adolescents autistes vers la vie sociale ordinaire, un projet québécois parie sur l’émergence de liens spontanés entre les jeunes, sans mode d’emploi préétabli.

Photo de groupe des jeunes neurodivergents qui participent au projet "Transition vers l'inclusion" pour les autistes.".

Dernières newsletters

Inscrits Gratuit

Pourquoi l'autisme " C'est sensoriel ! "

Les particularités sensorielles occupent une place centrale dans l'autisme mais font encore l'objet de bien peu de pédagogie quant à leur impact.

Pourquoi s'intéresser aux particularités sensorielles dans l'autisme ?
Inscrits Gratuit

🏁 Back to school 🏁

Si vous avez toujours un peu la tête en vacances, voici une édition allégée mais plus que jamais bourrée de ressources adaptées à l'autisme.

C'est encore un peu les vacances, mais la rentrée se profile, et il va falloir redescendre sur terre :-)
Inscrits Gratuit

Soulmate : égalité, fraternité et "autodé"

Rémy Ardurat a appelé son application d’autonomisation des personnes TSA "Soulmate". Mais l'âme sœur de l'histoire, c'est son frère autiste Théo, pour qui il repousse ses limites.

L'application Soulmate, créée par Rémy Ardurat, favorise l'autodétermination des personnes autistes.
Inscrits Gratuit

Éducation sexuelle : savoir protège

Pour les enfants autistes, dépasser nos propres tabous en matière de d'éducation à la sexualité est crucial.

Éducation sexuelle : savoir protège
Inscrits Gratuit

🤝"L'orthophonie, ça ne se passe pas que dans le cabinet"

"Celui qui doit savoir faire les choses, c'est le parent. C'est lui qui passe le plus de temps avec son enfant autiste", explique Emilie Le Gall, orthophoniste.

Emilie Le Gall - Orthophoniste spécialisée dans le champ des TSA et de la CAA. @lesfaceties_demilie sur Instagram