Soulmate : égalité, fraternité et "autodé"
Rémy Ardurat a appelé son application d’autonomisation des personnes TSA "Soulmate". Mais l'âme sœur de l'histoire, c'est son frère autiste Théo, pour qui il repousse ses limites.

Au sommaire :
📱 Application : la relation spéciale entre Rémy Ardurat et son frère TSA Théo a donné naissance à Soulmate (prononcer [sôlmeïte] à l'anglaise), une application qui favorise l'autonomie des personnes autistes.
🧰 Boîte à outils : Picto Chef, des recettes de pâtisserie adaptées.
👁️ Vu ailleurs : autisme des pauvres et richesse de l'autisme.
🌞Belle histoire : Adrien Charle est en route et à vélo "À la rencontre de l'autisme".
🎧 Spectre audible : quelles sont les représentations de l'autisme en entreprise ?
👩🎓 Webinaire : Focus sur la prestation de compensation du handicap (PCH)
Cette lettre est aussi un peu la vôtre. Si vous voulez réagir à l'un des sujets ou proposer une idée, vous pouvez laisser un 💬 commentaire 💬 ou ✍️ m'écrire ✍️. Je réponds toujours (parfois avec un peu de délai 😭).
📱 Rémy et Théo, âmes frères de l'application "Soulmate"
"Sensoriellement, ça va être immonde". La foule, la chaleur, le bruit, la lumière : tout son entourage déconseille à Rémy d'emmener son frère autiste Théo à un grand prix de Formule 1. Mais Rémy persiste : "Il adore les bagnoles, j'étais sûr qu'il allait kiffer l'expérience."
Résultat ? "C'était lui le plus en forme des quatre, il a adoré." Aujourd'hui encore, quand Rémy montre les photos de cette journée, Théo "a le sourire jusqu'aux oreilles".
Car depuis l'enfance, Rémy Ardurat, 27 ans, a la même philosophie : toujours traiter son frère, plus jeune d'un an et diagnostiqué en 2002, "d'égal à égal". Une approche qui a nourri la conception de Soulmate, une application qui vise à faciliter le quotidien et l'autonomie des personnes autistes.
Du "sixième sens" fraternel au déclic entrepreneurial
"Je ne sais pas vraiment ce que c'est que de grandir dans une famille 'normale' : j'avais un an tout juste quand mon petit frère est arrivé", raconte Rémy. Pour lui, l'annonce du diagnostic de Théo vers l'âge de trois ans n'est "juste qu'une singularité".
Il y a bien sûr des moments de frustration : "Je partais faire du vélo, mais je me sentais un peu con, tout seul alors que Théo était à la maison, et qu'on aurait pu faire du vélo ensemble, jouer au foot, ou construire des cabanes." Mais cette proximité quotidienne forge chez lui ce qu'il qualifie de "sixième sens" : "D'un clin d'œil, d'un geste, d'un comportement, je sais comment je peux le faire rire, comment on peut avoir une interaction." Il observe aussi son frère jongler avec les applications de son iPad, un support sur lequel "Théo a tout de suite accroché".
En 2022, après la période Covid, Rémy interroge, comme l’époque et les jeunes de sa génération, le sens de son métier de technicien informatique : "Qu'est-ce que j'apporte ? Je débranche et je rebranche les souris de mes collègues."
Le déclic viendra lors d'une réunion avec les professionnels et les familles de l'établissement où réside son frère : il les interroge sur l'existence d'une application unique qui centralise le suivi et les besoins fonctionnels des personnes prises en charge. Ils lui rétorquent, sans défiance : "Nous on n'en connaît pas, mais si vous voulez vous y coller..." Rémy confie : "Je l'ai pris comme un défi, et ça a planté une graine dans mon esprit".
De l'intuition fraternelle à l'innovation sociale
Ses parents, qui ont été partie prenante de l'association qui a créé et fait construire l'IME où Théo a été pris en charge, lui ont appris à se retrousser les manches : "Ils n'étaient pas têtes de proue du projet, mais ils ont dû se battre constamment. C'était un vrai parcours du combattant, il n'y avait de place nulle part".
Alors Rémy se forme seul au développement d'application et présente le projet d'application "Soulmate" pour rejoindre l'École Entrepreneuriale de Kedge Business School, qui conforte son intuition et sa confiance en l'intégrant.
Son point de départ ? Prévisibilité et repères sont essentiels pour réduire l'anxiété des personnes autistes. Or malgré la bienveillance des personnels des établissements, les résidents se retrouvent parfois ballottés : "On leur dit : monte dans la camionnette du foyer, on va aller à tel endroit. Mais c'est parfois difficile à appréhender en l'absence de repère", observe-t-il. Pourtant, "chaque personne devrait avoir le droit d'être au courant de ce qu'elle va faire et d'être rassurée", insiste-t-il.
Soulmate intégrera donc un emploi du temps visuel. Mais aussi des séquenciers de tâches pour plus d’autonomie, et un cahier de vie qui permet au bénéficiaire de partager ses activités avec ses proches, et peut être nourri par les professionnels. Elle sert aussi de cahier de liaison digital pour l’établissement.
Des fonctionnalités qui suivent toutes le même principe directeur : renforcer la dignité des personnes en valorisant leurs compétences et en favorisant l'autonomie et "remettre le bénéficiaire au cœur de son propre accompagnement" plutôt que de le laisser "spectateur" de sa propre vie. Une philosophie de l’autodétermination que Rémy a expérimentée intuitivement depuis l'enfance dans sa relation avec Théo.
Ce contenu est réservé aux inscrits à la newsletter. Bonne nouvelle, l'inscription est gratuite !
Chaque semaine, recevez directement par mail une sélection d’infos claires et pratiques pour mieux comprendre les besoins particuliers des enfants autistes et y répondre.
S’abonnerVous avez déjà un compte? Se connecter