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Éducation sexuelle : savoir protège

Pour les enfants autistes, dépasser nos propres tabous en matière de d'éducation à la sexualité est crucial.

Simon Loubris
Simon Loubris
10 min de lecture
Éducation sexuelle : savoir protège
Photo : charlesdeluvio via Unsplash

Au sommaire :

🍆 Tabou : pourquoi l'éducation sexuelle adaptée est cruciale, malgré nos réticences de parents.
🧰 Boîte à outils : le violentomètre, version autistique.
👁️ Vu ailleurs : les bénéfices de la musique pour les personnes autistes de plus en plus attestés.
✒️ Entre nous : l'Espagne, eldorado de Nubia et de son fils autiste
▶️ Spectre visible : un documentaire en immersion, un "spectre de questions"
👩‍🎓 Formation : l'insertion professionnelle des personnes TSA en milieu protégé.

Cette lettre est aussi un peu la vôtre. Si vous voulez réagir à l'un des sujets ou proposer une idée, vous pouvez laisser un 💬 commentaire 💬 ou ✍️ m'écrire ✍️. Je réponds toujours (parfois avec un peu de délai 😭).


🍆 Plaidoyer pour l'éducation sexuelle des enfants autistes


Parler de sexe est rarement évident.

C’est l’empire de l’implicite, le royaume de l’euphémisme, le fief de la malaisance. J’en veux pour preuve la difficulté à choisir un visuel pour illustrer ce texte (vous avez échappé à ça) et le 3 qui remplace le « e » dans le sujet pour passer les filtres anti-spam (je croise les doigts).

Parler de sexualité avec son enfant, c’est donc un exercice de contorsion qui met rarement les parents à l’aise.

Si votre enfant est autiste, c’est le super-banco : sujet socialement explosif  x (nécessité d’être « cash » + visuels explicites)

Et pourtant, rien ne sert de faire l’autruche : à la puberté, TSA ou pas, le sujet sera incontournable.

Or ni l’école, ni les établissements médico-sociaux sociaux ne vont s’y coller :

Donc, si vous voulez que ce soit bien fait, il va falloir dépasser vos propres réticences ! Car une éducation sexuelle adaptée est cruciale pour les enfants autistes. Voici pourquoi.

Un indicateur de la qualité de vie, historiquement « refusé » aux autistes

« Tout individu a le droit de vivre l'expérience de la sexualité selon une perspective agréable et positive. » Ce n'est pas un slogan militant, mais la position officielle de l'Organisation Mondiale de la Santé.

La sexualité dépasse d’ailleurs largement l'acte sexuel : sentiments, pensées, désirs, identité et relations. Un territoire si vaste qu'il est considéré comme un indicateur de qualité de vie.

"Malheureusement, tout comme les personnes présentant une déficience intellectuelle, les droits entourant les besoins et l’expression sexuels des personnes présentant un TSA ont été historiquement bafoués" explique ce rapport de recherche conduit par Marie-Hélène Poulin, de l'UQAT. Au tournant des années 80, certaines études mettent même en avant l’asexualité de la population autistique.

La recherche a depuis démontré que les personnes autistes ont des besoins affectifs et sexuels similaires aux personnes neurotypiques. Ce n'est pas l'existence de ces besoins qui diffère, mais leur expression.

La sexualité, un défi spécifique

Les règles du jeu de la sexualité sont particulièrement compliquées à déchiffrer pour les personnes autistes. 

  • Là où les ados neurotypiques apprennent les codes de la drague et de l'intimité en observant leurs pairs (ou en écoutant les confidences chuchotées dans la cour de récré), nos enfants autistes restent souvent sur la touche de cet apprentissage social informel. Ils n'ont pas accès à ce "manuel invisible" que les autres s'échangent.
  • Conséquence : à l'ère d'internet, beaucoup d'ados autistes se tournent vers la pornographie comme source d'information par défaut. Imaginez apprendre à conduire en regardant Fast and Furious... Le risque est donc grand qu’ils intègrent des représentations de la sexualité plutôt… biaisées.
  • Ensuite, toute relation intime repose sur une communication subtile, faite de sous-entendus, de regards, de gestes... Autant de nuances que nos enfants peinent à décoder. Comment comprendre qu'un sourire peut signifier "continue" mais qu'un autre veut dire "arrête" ?
  • Plus délicat encore : nos enfants peuvent avoir du mal à saisir que les autres ne pensent pas comme eux. Cette difficulté, une « théorie de l'esprit » limitée, complique énormément la notion de consentement. Comment deviner qu'une personne peut dire "oui" par pression sociale alors qu'elle pense "non" ?

Une absence d'éducation lourde de conséquences

Sans la boussole d’une éducation sexuelle adaptée, les situations problématiques rattrapent vite nos enfants et pèsent (très) lourd :

  • Des comportements sexuels socialement inappropriés comme la masturbation en public ou l'exhibitionnisme.
    C'est l'expression d'un besoin naturel sans la compréhension des codes qui l'encadrent. Il est donc impératif d'expliquer que certaines choses doivent rester privées, sans pour autant faire culpabiliser.
  • Des comportements sexuels problématiques impliquant autrui, comme toucher quelqu'un sans permission ou embrasser une personne sans son consentement.
    Ces comportements, bien que non intentionnellement malveillants, peuvent être perçus comme intrusifs ou agressifs par les autres, voire pénalement répréhensibles. Ainsi, une étude frappante (🇬🇧) expose que sur 43 adolescents jugés délinquants pour infraction sexuelle, 63% avaient un diagnostic de TSA.

Or trop souvent, "alors qu’elles peuvent apprendre et tirer profit d’une éducation sexuelle adaptée, les personnes autistes ne reçoivent une éducation sexuelle qu’après avoir manifesté un comportement sexuel problématique", explique le rapport de recherche de Marie-Hélène Poulin.

S’il y a donc bien un sujet où « mieux vaut prévenir (tôt) que guérir », c’est donc bien la sexualité.

Victimes sexuelles idéales

Et c'est aussi une façon de les protéger. Sans éducation sexuelle, les personnes autistes deviennent des victimes de crimes sexuels idéales : comment signaler un abus quand on ne peut pas le nommer ou qu’on ne le perçoit pas comme tel ? 

Les chiffres donnent le vertige : 88 % des femmes autistes sans déficience intellectuelle interrogées dans cette enquête conduite en 2018 déclaraient avoir été victimes de violence sexuelles. Également inquiétant, certaines victimes d'abus reproduisent ensuite ces comportements, faute de comprendre leur caractère inapproprié.

Or, et c’est essentiel, la recherche montre clairement que la connaissance de la sexualité est un facteur protecteur contre les abus sexuels. 

Passer à l’action : une philosophie de l’éducation sexuelle adaptée


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